Foumbouni, situé sur l’île de Grande Comore, et Ouani, sur l’île d’Anjouan, partagent une relation historique profonde, marquée par l’engagement et la solidarité des habitants d’Ouani envers le développement de Foumbouni. Cette fraternité a pris différentes formes au fil des décennies : de l’éducation à l’administration, en passant par le sport, les habitants d’Ouani ont joué un rôle clé dans le progrès de Foumbouni.
Les racines d’une collaboration dans les années 1930
L’histoire des liens entre Foumbouni et Ouani remonte aux années 1930, à une époque où les Comores étaient une province de Madagascar, rendant les déplacements vers l’île sœur un élément essentiel de la vie quotidienne. À cette époque, Foumbouni ne possédait qu’une petite école, la seule de la région de Mbadjini, et c’est grâce à l’implication d’enseignants originaires d’Ouani, comme Fundi Djamal et Abdou Bacar Nomane, que la scolarisation s ‘est développé à Foumbouni. Ces figures marquantes ont enseigné à des générations d’élèves, contribuant ainsi à l’essor de l’éducation dans la ville.
Fundi Djamal, par exemple, a marqué l’histoire en formant des élèves dès les années 1930, avec des promotions comme celles de 1932 et 1938. Il est reconnu pour sa rigueur pédagogique et son souci de l’efficacité. Un de ses élèves, Mbaba Koko, se souvenait d’un enseignement exigeant mais toujours empreint de bienveillance, où les examens se déroulaient dans une atmosphère sérieuse mais conviviale. Cette éducation, dispensée avec passion, a jeté les bases du développement intellectuel et social de Foumbouni.
L’implication d’Ouani dans l’enseignement des années 1960 à 1990
Au fil des décennies, les liens entre Foumbouni et Ouani se sont renforcés, notamment à travers l’arrivée de nouveaux fonctionnaires d’Ouani, comme Fundi Houbabi Salim Mchinda, un enseignant venu de Moroni et affecté à Foumbouni dans les années 1960, une figure emblématique du corps enseignant de Foumbouni. Très apprécié pour sa pédagogie innovante, il a marqué plusieurs promotions au cours de ses années d’enseignement, de 1961 à 1993. Un exemple de son efficacité pédagogique est sa méthode pour enseigner la lecture en français, qui consistait à assembler les consonnes et les voyelles de manière ludique et compréhensible pour les élèves. Cette approche, saluée par des inspecteurs pédagogiques, mettait en lumière son professionnalisme et sa capacité à s’adapter aux besoins des enfants de la région.
Dans les années 1970, Foumbouni vit l’arrivée de Chamsoudine Mohamed, un enseignant et littéraire d’Ouani, qui devient directeur du Collège d’Enseignement Secondaire (CES) de Foumbouni. Il travaille avec des enseignants canadiens et développe l’enseignement secondaire de la ville. Son année de direction marque le début d’une nouvelle ère pour l’éducation à Foumbouni, une période d’ouverture vers des connaissances plus larges et variées. Chamsoudine, également professeur de français, était connu pour sa passion pour la littérature et son enthousiasme à enseigner des œuvres comme celle de Verlaine, ce qui suscitait un grand intérêt chez ses élèves.
Le sport : Un vecteur d’unité entre Foumbouni et Ouani
Le sport, notamment le football, a également joué un rôle important dans le renforcement des liens entre Foumbouni et Ouani. En 1980, l’équipe de l’Étoile du Sud de Foumbouni remporte la Coupe des Comores, avec plusieurs joueurs originaires d’Ouani. Ces sportifs, comme Chadhuili Abdou Bacar et Alex, ont non seulement contribué à la victoire de l’équipe mais ont aussi permis à Foumbouni de rayonner sur le plan sportif. Ils sont devenus des symboles de l’unité et de la solidarité entre les deux villes, montrant que la compétition sur le terrain pouvait se traduire par une fraternité hors du terrain.
En 1984, lors d’une autre victoire en Coupe des Comores, Alex marque le mais décisif contre les Chiraziens de Domoni, ce qui a renforcé l’identité régionale de Foumbouni. Ces moments partagés ont permis aux habitants des deux villes de créer des liens forts, transcendant les frontières géographiques et renforçant l’idée d’une communauté comorienne unie.
Un héritage indélébile
Les habitants d’Ouani ont laissé une marque profonde sur Foumbouni, non seulement dans le domaine de l’éducation et du sport mais aussi dans l’administration. Le parcours d’Ahmed Mohamed Combo, originaire de Ouani, illustre parfaitement cette contribution. Enseignant et directeur du collège, puis proviseur du lycée, il a non seulement formé des générations d’élèves mais a également contribué à l’essor de l’éducation dans la région. Son engagement va au-delà de la salle de classe : il a également supervisé plusieurs collèges ruraux de Mbadjini, contribuant ainsi à la démocratisation de l’enseignement secondaire.
La relation entre Foumbouni et Ouani est ainsi bien plus qu’une simple coopération. Elle est le témoignage d’une solidarité historique et d’une union d’efforts pour l’éducation, le sport et la culture, permettant à Foumbouni de se développer et de prospérer tout au long du 20e siècle. Les contributions des habitants d’Ouani ont été cruciales pour le développement de Foumbouni et continueront d’être un modèle de collaboration intercommunautaire pour les générations futures.
Foumbouni, aujourd’hui encore, porte en elle l’héritage de ces échanges fructueux, célébrant l’unité entre les îles, l’éducation et la fraternité. Le souvenir de ces hommes et femmes venus d’Ouani est un hommage à la solidarité et à la force de la communauté, qui a permis à Foumbouni de se forger une identité propre, riche de ses influences et de ses liens indéfectibles avec Ouani.
De @Elehadj Mohamed – Transcription @VIF